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Quarantaine Jour 1

Dimanche 14 Mars. 8h02. Je suis devant le Casino Honoré Serres. Avec d’autres taré.e.s qui comme moi ont écouté l’allocution télé de Doudou hier soir.

8h10. C’est toujours fermé. Ça m’agace.

De comment tu gères ton attente que tout se passe comme tu veux quand tu veux.

8h15. Les portes s’ouvrent. On s’engouffre, c’est comme l’entrée du concert de Beyoncé.

Bon évidemment les rayons pâtes et lingettes désinfectantes sont un peu tout mous.

C’est là que tu te dis que niveau originalité on n’est pas au top. Si on te dit que tu vas devoir être enfermée pendant deux semaines, tu achètes quoi ? Ben des pâtes. Des pâtes fraiches. Des remplies. Des pas. Des longues, des courtes. Tu te dis, j’ai pas d’idées, mais au moins je peux faire dans la diversité niveau pâtes.

Après tu fais comme tout le monde, PQ, mouchoirs, Ajax anti-bactéries, chocolat pack familial pour éviter la déprime, boudoirs parce que tu es en pleine régression infantile, gingembre pour booster ton système immunitaire, et un peu d’après shampooing parce que ce serait couillon d’avoir les cheveux tout cassants en période de crise sanitaire.

C’est 9h, tu rentres chez toi, tu mets toutes les tisanes Relax Détente dans le placard et déjà tu te demandes ce que tu vas faire de ta journée.

L’angoisse du vide. Tu sens une sorte de frétillement au cœur de ta poitrine. Une agitation sourde. Un questionnement profond.

J’ai passé 41 ans à combler ma peur du vide par de l’hyper-activité intense et vlati pa que bam, nos amis chinois me détruisent tout mon montage psycho-social en deux deux.

Plus de mouvements. Plus de voyage. Plus d’ateliers, de conférences, d’événements. Plus de sorties entre ami.e.s. Plus de faux prétexte pour changer de ville tous les 7 jours. Non, tu restes sur place, seule et tu attends. Au mieux, tu tricotes.

Mon pire cauchemard, mais pour de vrai. Parce que moi, la vérité, j’ai pas peur de mourir, j’ai peur de mourir seule, de crever isolée du reste du monde, d’être rejetée par mes amis proches qui pensent que je suis vraiment relou là et que c’est mieux si en vrai j’étais pas là.

Une copine me dit : c’est la période idéale pour confronter tes peurs.

Mais qui a envie de confronter ses peurs ???

On se marie, on fait des enfants, on voyage, on s’engueule, on bosse, on achète, on mange, on boit, on baise pour ne pas confronter ses peurs.

Elle est bonne celle-là. Confronter ses peurs.

Ça fait une semaine que je suis en déni en faisant du binge watching sur Netflix dans une chambre de dix mètres carrés au Danemark, crois-moi, les peurs, je les évite bien.

Du coup, je mate sur Instagram une énième vidéo philosophique de Jason Silva qui m’explique le changement de paradigme en cours et j’ai envie de chialer. Bon c’est peut-être les règles. Mais c’est peut-être aussi que ça me touche ce sentiment d’être séparée des gens ou des lieux que j’aime, ces preuves de solidarité en Italie ou en Espagne, ces moments où on en revient à l’essentiel.

Ce à quoi mon père me répond : Aurélie, tu penses trop.

Ben oui, forcément, je pense trop. Tu me connais pas ou quoi ? J’ai pas emmagasiné dans mon placard les 250 cahiers sur lesquels j’ai écrit mes discours intérieurs entremaillés de TO DO lists depuis 25 ans pour rien. Quand on gère le trauma par le contrôle et l’hyper-sensibilité par la planification, oui, Einstein, on a tendance à trop penser.

Cf. le livre éponyme de Christel PetitCollin à ce sujet (merci Hugo):

Si vous lisez ce texte et que vous êtes dans mon entourage, il y a 95% de chances que cela vous concerne aussi. Petite reco lecture utile en ces temps de crise.

Allez, je fais une pause, je vais prendre une tisane. A plus tard.

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